En décembre 1920, le Congrès de Tours du Parti Socialiste (Section Française de l’Internationale Ouvrière) adoptait à une large majorité une résolution du Comité de la 3e Internationale, et créait ainsi la Section Française de l’Internationale Communiste (SFIC), plus tard appelée Parti Communiste. Le Comité de la 3e Internationale avait été fondé en france en mai 1919 par des révolutionnaires qui s’étaient opposés à la Guerre mondiale : à sa tête se trouvaient Fernand Loriot, Boris Souvarine et Pierre Monatte.
Il faut rappeler que le stalinisme naissant a été dénoncé dès les années 1920 par des militants communistes, qui furent pour cela exclus par la bureaucratie. La dictature capitaliste d’Etat exercée en URSS contre les travailleurs a été critiquée comme telle par de nombreux communistes, par des fondateurs du parti comme Loriot, Souvarine et Monatte, par des communistes anti-staliniens de tous pays, par des luxemburgistes, des conseillistes, d’autres marxistes, des socialistes révolutionnaires, des communistes démocratiques, etc.
À l’inverse, le parti stalinien a eu des positions opposées aux intérêts des travailleurs et opposées aux principes du communisme, en particulier en renonçant à toute perspective révolutionnaire (comme on l’a vu en 1936, 1945 et 1968), en soutenant le pacte Hitler-Staline au début de la Seconde guerre mondiale, en votant les pleins pouvoirs au « socialiste » Guy Mollet pour écraser la révolte algérienne dans les années cinquante, pour finir par adhérer au Programme commun de gestion du capitalisme avec le PS dans les années 1970, jusqu’au gouvernement Jospin.
Même après la fin de l’URSS en 1991, en l’absence d’un bilan de fond et d’une véritable remise en cause politique et historique, il n’y a pas eu de retour possible du PCF vers le communisme qui était porté par ses véritables fondateurs, les militants du Comité de la 3e Internationale. Il ne reste donc pour ainsi dire rien du Congrès de Tours.
Mais l’objectif d’auto-émancipation des travailleurs, d’un monde libéré du capitalisme, de l’exploitation par le travail salarié et des Etats, reste pleinement d’actualité : à l’opposé du stalinisme, le projet communiste reste celui d’une communauté humaine mondiale, d’« une association où le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous »1.
Pour y arriver, « l’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes »2, et non celle d’un parti autoritaire, séparé des masses par la professionnalisation et la confiscation des tâches politiques.
1 Karl Marx, Manifeste communiste, 1848.
2 Statuts de l’Association Internationale des Travailleurs (Première Internationale).
-> Le n° 13 de Critique Sociale en PDF.
-> Ce texte en tract : 90 ans après, que reste-t-il du Congrès de Tours ?