Les perspectives d’émancipation au 21e siècle

Une analyse lucide, débarrassée des illusions qui ont souvent cours, montre que nous vivons dans une société mondiale injuste et violente. L’ordre économique qui règne partout dans le monde est basé sur le système du salariat, c’est-à-dire une organisation inégalitaire et dangereuse (plus de 2 millions de morts par an[1]) d’un travail le plus souvent contraint.

Le salariat est en effet un des piliers du capitalisme, forme économique dont le règne est mondial, et qui modèle la société autour de ses valeurs intrinsèques : concurrence, compétition, précarité, salariat, exploitation. L’histoire a montré que, malgré des différences réelles, toutes les formes de capitalisme sont injustes, violentes, et instables.

Cette société est donc avant tout dominée par des inégalités d’une intensité incroyable. Corollaire du constat précédent, la société mondiale se caractérise également par la confiscation du pouvoir politique : soit par des dictatures personnelles ou d’un groupe très restreint, soit par une « dictature » constitutionnelle, où la liberté d’expression est pour l’essentiel garantie, mais où une classe sociale minoritaire détient la réalité du pouvoir, et où quelques dizaines de personnes (certains élus, d’autres non) en dirigent des millions d’autres – ce système étant, ironiquement, couramment appelé du nom de… « démocratie ».

Il ne faut évidemment pas négliger les avantages multiples et précieux de ce dernier système par rapport aux dictatures « complètes ». Aucune relativisation des différences fondamentales qui existent ne peut découler de cette analyse.

Notons cependant qu’il est parfois difficile de décider si on doit considérer tel ou tel régime comme un système « mi-dictatorial mi-démocratique », ou tout simplement comme un régime dictatorial. L’actuel régime de Vladimir Poutine est un bon exemple de la limite parfois ténue entre ce qui est abusivement appelé « démocratie », et ce qui est justement appelé dictature. Dans tous les cas, il est juste et indispensable de lutter dans la voie de la démocratisation des systèmes existants, et d’y défendre les éléments démocratiques – qui ont été conquis par des luttes.

Le manque de démocratie ne vient pas en premier lieu de la nature des « hommes de pouvoir », mais du fait même qu’il existe des « hommes de pouvoir », et donc des hommes et femmes sans pouvoir, le pouvoir des premiers s’exerçant sur les seconds. La nature des « hommes de pouvoir » a un impact bien réel, mais les structures existantes sont déjà un obstacle à une véritable démocratie. Le premier obstacle est l’existence même d’une division hiérarchique, la séparation entre dirigeants et dirigés, qui est contraire à la démocratie. Ensuite c’est la nature des institutions, lesquelles donnent par des élections tous les 4 ou 5 ans tout pouvoir à un groupe restreint, pour une durée déterminée. Enfin, la personnalité et le degré d’autoritarisme des individus exerçant le pouvoir a, évidemment, également son importance.

La société est de plus gangrenée par des préjugés qui divisent encore plus les êtres humains. C’est le cas du sexisme et du racisme, qui instaurent des divisions voire des haines artificielles, construites socialement du fait des organisations sociales inégalitaires et aliénantes ayant existé jusqu’ici et existant encore aujourd’hui.

A l’inverse, tous les êtres humains pourraient et devraient être des citoyens du monde, pouvant construire un avenir débarrassé des frontières héritées des modes de domination qui doivent être dépassés.

De même, il est possible de remplacer le système du pouvoir exercé par une minorité, par un pouvoir social, une démocratie réelle : le pouvoir au peuple lui-même.

Malgré le refrain fataliste selon lequel toute amélioration globale serait impossible, des possibilités existent bel et bien pour une émancipation générale des êtres humains de la planète, permettant que le slogan révolutionnaire « Liberté – Egalité – Fraternité » devienne une réalité mondialement vécue.

Dès lors, une question s’impose : quelles sont les perspectives d’émancipation au 21e siècle ? Il est évidemment impossible de répondre complètement à cette question, étant donné le cours changeant de l’Histoire. On peut cependant apporter des éléments de réponse.

Il importe pour cela de passer par un autre constat : l’héritage politique du 20e siècle, qui a déçu de nombreux espoirs du 19e siècle. Pour contribuer à améliorer en toute conscience l’avenir, il est indispensable de connaître et de comprendre le passé – et donc le présent.

La volonté d’émancipation n’est en effet pas nouvelle, et a en particulier aux 19e et 20e siècles été recherchée sous le nom de socialisme. Aujourd’hui, il arrive que le mot « socialisme » semble ne plus signifier grand chose, voire soit compris comme l’inverse de ce qu’il signifie.

Selon la définition de Karl Marx, le socialisme et/ou le communisme[2] consistent en ce que « l’ancienne société bourgeoise, avec ses classes et ses conflits de classes, fait place à une association où le libre épanouissement de chacun est la condition du libre épanouissement de tous. »[3] Force est de constater que la grande majorité des politiciens qui nous parlent de socialisme n’ont absolument pas cela en tête : le mot socialisme continue à être employé, mais de soit-disant « socialistes » nient dans leur pratique cette synthèse de Marx – tout en se prétendant parfois « disciples » de Marx !

Le terme est donc trop souvent compris par rapport aux trahisons commises sous le masque du « socialisme » (ou du « communisme »), et non par rapport au contenu réel de ce concept. Il s’agit là d’un fait regrettable, mais qui existe bel et bien et donc doit être pris en compte.

Mais dans l’héritage du 20e siècle, il y a notamment le fait que l’étatisme – qui a parfois été fallacieusement assimilé au « socialisme » – a montré en pratique sa faillite, en particulier sous sa forme léniniste de capitalisme d’Etat, et sous sa forme « sociale-démocrate » de gestion du capitalisme traditionnel (capitalisme de marché) – sans même parler des régimes ouvertement conservateurs. La réfutation historique s’ajoute ainsi à la réfutation théorique, pourtant évidente ; citons par exemple Maximilien Rubel : « Je ne vois pas dans le socialisme une entreprise de planification et de nationalisation étatiques ; j’y vois même le contraire du socialisme. »[4].

Ainsi, il faut prendre acte qu’au sein du mouvement ouvrier du 20e siècle, des tendances décomposées sont apparues, s’inspirant de contenus extérieurs au socialisme et au communisme, et même opposés à ceux-ci. Ces courants ont conduit à se tirer une balle dans le pied, voire à lutter très exactement contre ses propres intérêts (voir le cas extrême du stalinisme, ennemi en son essence même du mouvement ouvrier).

Par exemple, l’internationalisme, une des bases indispensables du socialisme, a souvent été vidé de son sens réel, qui est l’objectif concret d’un monde sans patrie ni frontières.

Pour ce qui est des méthodes, les illusions qui ont été celles de certains « socialistes », sur les « coups de mains » et les « minorités agissantes », appartiennent pour l’essentiel au passé, même s’il en reste malheureusement des séquelles au sein de certains courants se revendiquant abusivement du socialisme. Les actions de ces courants n’ont fait et ne font que prouver, à contrario de leurs pratiques, la validité du principe selon lequel « l’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ».

La transformation socialiste de la société ne peut pas trouver de « raccourci », et n’a – au sein de la société hiérarchique-capitaliste telle qu’elle est – pas d’autre alternative que le recours à un processus révolutionnaire de démocratisation et de conquête de l’égalité, processus impliquant nécessairement l’investissement conscient et actif de la majorité de la population.

Enfin, l’expérience a montré le caractère éminemment nocif de la logique d’appareil, qui amène à la bureaucratisation. Quand les conditions d’existence d’une personne dépendent du poste qu’il peut occuper (de permanent, d’élu…), c’est-à-dire qu’une position obtenue par la politique lui garantit ses conditions de vie, alors tout est vicié d’avance – quelles que soient par ailleurs les qualités initiales de ceux qui parviennent à ces postes (même s’il est exact que « le pouvoir attire les corruptibles »).

C’est donc un devoir révolutionnaire que de lutter contre les organisations hiérarchiques, contre les directions qui décident à la place des militants, contre l’existence de permanents salariés, contre tous les « chefs » qui, s’il en existe, tendent à se substituer tôt ou tard au mouvement réel. C’est un devoir permanent d’éliminer toute tendance à la bureaucratisation, d’éviter que l’activité politique amène des privilèges, que des structures (politiques ou syndicales, notamment) créées à l’origine pour l’intérêt commun, ne deviennent des appareils luttant d’abord et avant tout, voire exclusivement, pour leur propre survie et développement.

La démocratie doit être respectée le plus scrupuleusement possible au sein des structures de lutte, elle doit être un objectif permanent au sein du mouvement émancipateur, et surtout être un objectif pour l’ensemble de la société. La démocratie reste un projet d’avenir, puisque « nous n’avons jamais rien connu qui ressemble même de loin à une démocratie »[5].

Ne pas céder à l’« ultra-centralisme » est une nécessité. Une centralisation des informations est indispensable, mais pas forcément une centralisation des décisions. Les organisations luttant pour l’émancipation doivent être constituées d’égaux, ce qui implique un effort permanent de formation, et une habitude de libre débat et d’élaboration collective.

Une grande souplesse doit permettre de s’adapter aux différentes circonstances, et de respecter les opinions divergentes, sans pour autant renoncer aux principes fondamentaux qui doivent guider l’action globale.

Voici ce qu’écrivait Karl Marx en 1864 : « Considérant : que l’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ; que les efforts des travailleurs pour conquérir leur émancipation ne doivent pas tendre à constituer de nouveaux privilèges, mais à établir pour tous des droits et des devoirs égaux et anéantir la domination de toute classe »[6]. C’est une base qui peut encore inspirer les mobilisations pour la transformation du monde.

Le mouvement émancipateur, devant prendre en compte l’ensemble des exigences émancipatrices (en premier lieu démocratiques, anti-capitalistes, anti-sexistes, libertaires, égalitaires), doit être un vaste regroupement prenant conscience de sa visée universelle, des exigences que cela entraîne en terme d’objectifs comme de moyens. Le but est d’éliminer toutes violences : sociales, économiques et physiques – violences qui se recoupent souvent.

Un processus révolutionnaire démocratique et social au niveau mondial est actuellement indispensable pour obtenir la conquête de la démocratie réelle, et un changement radical de l’organisation économique et sociale. Ce processus ne peut atteindre ses buts que s’il est mené comme création collective, où spontanéité et conscience se complètent, où théorie et lutte pratique forment un ensemble cohérent qui avance de concert.

Les moyens pour parvenir à une société libérée sont, en effet, ceux d’un mouvement social émancipateur majoritaire ayant conscience de la nature de la société actuelle et de ses limites. Pour accomplir cette transformation du monde, il est nécessaire d’arriver à passer outre les préjugés et présupposés de l’idéologie dominante, qui sont solidement implantés. L’organisation actuelle du monde se fait passer comme évidente et indépassable, ce qui est mensonger dans les deux cas ; mais cela contribue à faire apparaître comme impossible des améliorations importantes par une transformation des structures mêmes de la société. Face à cette propagande qui vise à perpétuer le système actuel, ses privilèges et ses inégalités, « il faut comprendre pour agir, et naturellement, agir pour comprendre »[7]. La conscience permet de renforcer l’action, et c’est dans l’action que la conscience peut se développer pleinement.

Pour ce qui est du changement de mode de production, l’abolition du capitalisme est un processus qui devra passer notamment par la socialisation, l’appropriation collective (et non étatique) des grands moyens de production. Cette fin de la dictature économique, inhérente au capitalisme et à tout système économique hiérarchique, est un des éléments fondamentaux permettant d’arriver à la réalisation effective de la démocratie.

Une révolution sociale émancipatrice, qui pourrait se produire au 21e siècle (ou plus tard si les évolutions et les évènements nous sont défavorables), correspond à un processus long d’abolition des rapports de production capitaliste : travail contraint, fonctionnement hiérarchique, inégalités sociales.

Il s’agit évidemment de s’en prendre au système, et certainement pas aux personnes. Les moyens de transformation sociale doivent être en cohérence permanente avec les objectifs recherchés. La formule « la fin justifie les moyens » ne sert qu’à camoufler la trahison du but final (que cette trahison soit consciente ou non) : cette formule doit donc être rejetée et combattue.

Pour réussir, un processus de démocratisation et d’auto-émancipation de la société mondiale devra faire preuve de suffisamment de créativité et d’invention collectives pour permettre l’abolition de l’argent, des marchandises, et des classes sociales.

L’égalité, qui n’est certainement pas l’uniformité, entraînera forcément pour l’actuelle minorité privilégiée une baisse du « train de vie », mais aussi et surtout la fin d’une position aliénante (en devenant égaux – et non plus exploiteurs comme actuellement, même quand ils sont dénués de volonté d’exploiter). A cette exception près, le mouvement émancipateur se doit d’adopter comme règle permanente que tout changement, toute modification soit, pour tous et pour chacun, au moins équivalente, et bien sûr si possible amélioratrice – et ce quelles que soient les circonstances.

Ce résultat laisserait ouvert un vaste champ de possibles différents, ayant comme socle une société mondiale libre, égalitaire et fraternelle. En effet, ce dépassement de l’ère hiérarchique-capitaliste permettrait à différentes formes successives de société d’exister et de s’épanouir, leur base commune étant qu’elles seraient formées d’individus émancipés, libres et égaux.

Cette auto-émancipation permettrait d’aller vers la « pacification de l’existence » dont parlait Herbert Marcuse : « « Pacification de l’existence », cela veut dire que les besoins, les désirs, les aspirations ne sont plus régentés par des intérêts privés, visant à dominer et à perpétuer les formes destructives du combat de l’homme avec la nature. »[8]

La satisfaction des besoins élémentaires pour tous est en effet un objectif souhaitable et réalisable à terme, mais qui nécessite de bouleverser les structures de la société.

Les seules illusions en l’espèce sont de croire :

– soit que l’organisation actuelle de la société peut se perpétuer éternellement ;

– soit que la satisfaction des besoins élémentaires pour tous est possible au sein du carcan capitaliste ;

– soit qu’il suffirait d’une action de quelques uns (ou dirigée par quelques uns), ou d’un « bon » gouvernement, pour atteindre les objectifs d’émancipation.

Ces illusions sont très répandues, et découlent toutes des présupposés de l’idéologie dominante, tout comme elles contribuent en fait à maintenir la domination de cette idéologie de la classe dominante[9].

Les perspectives d’émancipation sont donc conditionnées par le mouvement réel de lute contre l’ordre établi. Or, les mobilisations, le mouvement émancipateur présent dans la société, est déjà plus qu’uniquement défensif : on peut citer les exemples du féminisme (tout récemment a été conquis le droit à l’Interruption Volontaire de Grossesse au Portugal), ou de la lutte contre la discrimination homophobe. Mais le chemin à parcourir reste immense : les disparités sont criantes suivant les régions du monde et les différents régimes existants, et des régressions se produisent régulièrement. Face à cela, la défense des acquis doit être accompagnée de l’objectif clairement affiché d’aller vers l’égalité réelle, en droit et en fait.

Par exemple, au sein des entreprises multinationales, les salariés sont devant la nécessité d’organiser des grèves et manifestations concertées dans les différents pays, des actions simultanées dans toutes les entreprises et si possible chez les sous-traitants. C’est ce qu’ont fait les salariés d’Airbus en mars 2007 dans plusieurs pays européens, pour empêcher un vaste plan de licenciements.

Le succès, cependant, dépend du recours à des moyens d’action adaptés dans le cadre d’un rapport de force difficile ; un des principaux de ces moyens étant la grève reconductible des travailleurs (ce qui n’a malheureusement pas été le cas chez Airbus). Seule la construction internationale d’une mobilisation déterminée, pleinement menée par les travailleurs eux-mêmes, peut empêcher les régressions et revendiquer efficacement une harmonisation par le haut de la situation des salariés des divers pays concernés.

Les partisans d’un socialisme authentique se doivent de contribuer en permanence aux mouvements de résistance contre les reculs, et de lutte pour l’émancipation. La théorie socialiste doit impérativement se débarrasser des contrefaçons, et des éléments conservateurs voire réactionnaires qui se sont appelés fallacieusement « socialisme ». Ce n’est ni à un parti, ni à une « avant-garde », ni à quelques chefs de diriger le mouvement. « C’est la masse elle-même qui doit être mûre pour faire face à toutes les éventualités politiques, c’est elle qui doit déterminer elle-même ses actions et ne pas attendre qu’au « moment donné » le chef d’orchestre, tout là-haut, lui donne le signal »[10]. La place des socialistes est au sein du mouvement émancipateur comme partie prenante, les socialistes donnant comme tous les autres leur avis et apportant leur contribution sans arrière-pensée ni « tactique ».

Sans attendre cette période de transformation historique, les socialistes doivent retrouver leur fonction de critique sociale, critique de toutes les oppressions et de toutes les inégalités, ainsi que contribuer à l’effort de compréhension des causes structurelles des problèmes quotidiens, à l’analyse des luttes, et à l’Histoire du mouvement émancipateur dans sa diversité.

Une autre tâche des socialistes consiste à faire connaître et à analyser les dégâts environnementaux causés par le développement du capitalisme, et à proposer des alternatives écologiques et durables. Un exemple parmi d’autres est celui des transports. A la place de transports individuels coûteux pour l’utilisateur et coûteux en énergie, ainsi que polluants, il serait bien plus rationnel de développer de véritables services publics gratuits de transport, pluralistes (trains, tramways, métros, bus à carburant non-polluant, vélos…), desservant largement les territoires. C’est une solution socialement juste, écologique, efficace, plus agréable (permettant par exemple d’éviter le bruit des voitures et les odeurs de pots d’échappement dans les villes), et qui permet d’éviter de terribles gaspillages d’énergie.

Mais il faut avoir conscience que cette solution implique de s’en prendre aux institutions du pétrole et de la voiture, qui sont deux fondements de premier plan de l’économie capitaliste depuis des décennies – ce qui explique pourquoi cette solution est écartée.

Cette contribution des socialistes à la fonction de critique sociale doit se faire en alchimie avec le mouvement d’ensemble, elle doit s’adresser largement vers l’extérieur – il ne s’agit pas de se contenter de débats « internes ».

Le travail intellectuel de critique ne peut efficacement se concevoir que comme complémentaire, et surtout étroitement lié, au travail quotidien de critique du réel, qui se mène dans les diverses mobilisations contre les conséquences de l’organisation hiérarchique et capitaliste de la société.

C’est en retrouvant cette fonction critique, et en étant pleinement partie prenante d’un mouvement mondial d’auto-émancipation qu’il faut contribuer à développer et à unifier, que les socialistes révolutionnaires peuvent être utiles à la lutte pratique, au mouvement réel quotidien.

Il n’est pas utopique de dire que le 21e siècle peut voir le point de départ d’une telle révolution auto-émancipatrice – qui ne peut être que mondiale ou échouer.

Un des points primordiaux qui doit donc être mis en avant, c’est qu’il est nécessaire de dépasser concrètement dans les mobilisations le cadre des Etats, pour contribuer à la liaison effective entre les luttes dans les différents pays, pour confirmer dans l’action qu’il s’agit en fait d’une lutte commune, qui est malheureusement trop souvent fractionnée. Informer des situations sociales et des luttes menées partout dans le monde est indispensable pour arriver à la coordination de la lutte de classe menée mondialement.

Enfin, il nous faut connaître l’histoire des luttes, des divers mouvements et changements sociaux, afin de ne pas répéter les mêmes erreurs, et de tirer les enseignements des expériences passées. Un des éléments utiles dans ce but consiste en ce que le mouvement émancipateur se doit de connaître et d’intégrer les apports des bases réelles du socialisme, en prenant en compte et en tirant les leçons de près de deux siècles d’Histoire du monde, pour arriver à l’émancipation effective, à une communauté humaine mondiale.

Pour y parvenir, la seule boussole valable, c’est l’esprit critique constant.


[1] Le Bureau International du Travail estime à 2.250.000 par an le nombre de morts du travail, cf communiqué de l’Organisation Internationale du Travail du 28 avril 2004 :
http://www.ilo.org/…

[2] La séparation de contenu entre ces deux termes est postérieur à la mort de Marx. Selon les textes, les deux termes sont employés par lui indifféremment.

[3] Karl Marx, Manifeste communiste, 1848 (dans Karl Marx, Philosophie, Gallimard, 1994, p. 426).

[4] Maximilien Rubel, lettre à Boris Souvarine du 15 avril 1960 – souligné dans l’original.

[5] Simone Weil, Note sur la suppression générale des partis politiques, Flammarion, 2006, p. 33.

[6] Déclaration pour la présentation des statuts de l’Association Internationale des Travailleurs, 1864, texte rédigé par Karl Marx et adopté par le conseil général de l’AIT.

[7] Eugène Varlin, Pratique militante et écrits d’un ouvrier communard, L’Harmattan, 2002.

[8] Herbert Marcuse, L’Homme unidimensionnel, éditions de Minuit, 1968, p. 41.

[9] « A toute époque, les idées de la classe dominante sont les idées dominantes » – Karl Marx, L’Idéologie allemande, 1845-1846 (dans Karl Marx, Philosophie, Gallimard, 1994, p. 338).

[10] Rosa Luxemburg, Usure ou combat ?, article dans Die Neue Zeit, 1910 (traduction en français dans Socialisme la voie occidentale, Puf, 1983, p. 96).