La lutte sociale contre la casse sociale

Une récente étude de l’Insee a confirmé que la crise capitaliste et la politique menée ces dernières années avaient entraîné une diminution des revenus pour la majorité, et aggravé les inégalités. En 2010, « le niveau de vie baisse ou stagne pour pratiquement toutes les catégories de population, sauf les 5 % les plus aisés ».

Et la France n’est pas un cas isolé, puisque la « hausse des inégalités depuis la crise s’observe dans la majorité des 27 pays de l’Union européenne ». Le chômage continue également d’augmenter : avec un taux de 11 % la France est dans la moyenne de l’Union européenne, où l’on compte maintenant plus de 26 millions de chômeurs1. L’austérité généralisée montre donc, sans surprise, ses conséquences sociales : ce sont les classes populaires qui paient pour la crise capitaliste.

Et l’année 2013 devrait maintenant être marquée par la récession, tant en France que plus largement en Europe2.

Or, face à ce contexte social, quelle est la situation politique ? Comme souvent en période de crise, on observe une force du repli et de la peur. Cela s’est incarné ces dernières semaines par l’opposition au mariage pour tous. Outre les préjugés et l’homophobie, des peurs irrationnelles se sont cristallisées sur ce sujet – mais elles auraient pu tout autant l’être sur autre chose. Cet activisme du côté des conservateurs et des réactionnaires n’est heureusement pas resté sans réponse.

Mais le camp des travailleurs n’est pas encore parvenu à s’exprimer comme force sociale autonome, c’est-à-dire opposée à la fois au patronat et à l’Etat. La mobilisation contre l’accord national interprofessionnel (ANI, ou accord Medef-CFDT3) est restée très insuffisante. L’unité à la base ne s’est pas construite et les manifestations, en l’absence de véritables appels à la grève d’ampleur, ont été quasiment symboliques.

Pourtant, pour en finir avec la casse sociale, la lutte sociale est indispensable. Il s’agit de faire la critique en acte de la situation de crise sociale vécue actuellement au sein des classes travailleuses, ce qui implique non seulement la critique de la politique gouvernementale, mais aussi plus largement la critique de l’état de choses existant. Cela passe par l’action collective décidée et organisée par les travailleurs, chômeurs, précaires et jeunes eux-mêmes. En l’absence d’une telle mobilisation des régressions se poursuivraient, qu’elles passent par la loi – comme l’ANI – ou directement dans les faits, par exemple les temps de pause des travailleurs parfois rognés voire supprimés, etc. La lutte de classe est donc le seul moyen d’empêcher les reculs sociaux.

1 Insee, Les Revenus et le patrimoine des ménages, édition 2013 (où l’on peut lire que « seules les catégories les plus aisées échappent à la stagnation ou à la baisse du niveau de vie en 2010 »). Voir aussi « La crise appauvrit les plus pauvres, quand les plus riches s’enrichissent », Libération, 24 avril 2013.

Eurostat, « Le taux de chômage à 12,1 % dans la zone euro, à 10,9 % dans l’UE 27 », 30 avril 2013.

2 OFCE, Le Commencement de la déflation, perspectives 2013-2014 pour l’économie mondiale, 17 avril 2013.

3 Voir « Non à l’austérité, non à la précarité ! », Critique Sociale n° 25, mars 2013.